Disparition : Frédéric Mitterrand

Un dernier « bonsooooaaaar »

Disparu des suites d’un cancer à l’âge de 76 ans, le neveu éclectique de François Mitterrand, aura navigué de la télévision au cinéma, de la villa Médicis au CNC… Cette personnalité inclassable avait annoncé en avril 2023 être « malade (...) depuis trois mois ». « Je porte une casquette parce que je suis malade », avait-il déclaré.

Son lyrisme, son phrasé désuet et son parcours sulfureux

Un diplôme de Sciences Po pour bagages, le cinéma aura été sa colonne vertébrale dans sa vie parisienne où se projettent, chaque jour, le plus grand nombre de films au monde. Sa passion, c'est le cinéma. A 13 ans, il joue le fils de l'actrice Michèle Morgan dans « Fortunat », avec Bourvil (1960). Adulte, après quelques années d'enseignement, il retourne à ses premières amours : il rachète une salle à Paris puis crée un réseau d'art et essai, qu'il anime pendant 15 ans. Le 7e art est un dieu qu'il aura servi par de multiples canaux :

• A la télévision (Étoiles et toiles)
• En réalisant des films (Lettres d'amour en Somalie, Madame Butterfly, film opéra produit par Daniel Toscan du Plantier)
• En produisant (Avril brisé)
• En perdant des millions avec sa dizaine de salles de cinéma créées à Paris. Il participe à des commissions du CNC.

Son tonton était président, quatorze années à l'Élysée pour François Mitterrand…

Partager le patronyme de son oncle relève plutôt de l'incident avec lequel il a fallu jouer tout au long de sa carrière. « C'est un multiplicateur d'avantages et un multiplicateur d'ennuis, témoignait-il en 1992 devant Thierry Ardisson. Il y a des gens qui deviennent plus aimables, des gens qui deviennent moins aimables. Mais si les gens deviennent plus aimables ou moins aimables pour ça, ils se trompent. Cela n'a aucun intérêt. »

C'est Nicolas Sarkozy, qui le propulsera ministre de la culture

Le dandy de la politique accède à des fonctions institutionnelles et devient, en 1995, commissaire général de la saison tunisienne en France. En 2008, il est nommé par Nicolas Sarkozy directeur de l’Académie de France à Rome, à la Villa Médicis. Un an plus tard, il devient ministre de la Culture en juin 2009. Après son départ du ministère, en mai 2012, il fait son retour à la radio. Entre 2013 et 2014, il anime durant une saison l’émission Jour de Fred sur France Inter.

Frédéric Mitterrand est l’auteur de nombreux ouvrages : Mémoires d’exil, La mauvaise vie, livre publié en 2005, Frédéric Mitterrand avait fait le récit de ses errances sexuelles et tarifées en Thaïlande. Le livre avait suscité la polémique, l'obligeant à se défendre de toute relation avec des mineurs ou d'apologie de la pédocriminalité. Ces autres ouvrages racontent ses joies et ses tourments : Une adolescence, ou encore Mes regrets sont des remords. En avril 2022, il publie un nouveau roman, 1938 l'oeil du cyclone.

Les réactions du monde politique et médiatique

« Carla et moi avons appris avec une immense tristesse le décès de Frédéric Mitterrand […] un homme profondément cultivé et délicat, une personnalité inclassable si loin de la vie partisane », a salué Nicolas Sarkozy.

La ministre de la Culture, Rachida Data, garde en mémoire « le sourire lumineux de Frédéric et l'inimitable grain de sa voix ». Jack Lang se dit « bouleversé » : « Une amitié de plus de 60 ans nous liait d'une affection inaltérable. Notre fidélité commune pour François Mitterrand nous unissait profondément. »

La personnalité la plus émue est sans doute Stéphane Bern, qui a appris la mort de Frédéric Mitterrand en direct sur le plateau de C à vous, sur France 5, et déclaré, des sanglots dans la voix : « C'était mon modèle, c'était un ami. J'aurai du mal à en parler au passé. »